Difficile de passer à côté du roman de Madeline Miller, Circé. Surtout si vous êtes fan de mythologie. Et l’oeuvre ne vole absolument pas son succès !
Résumé : Helios, dieu du soleil, a une fille : Circé. Elle ne possède ni les pouvoirs exceptionnels de son père, ni le charme envoûtant de sa mère mais elle se découvre pourtant un don : la sorcellerie, les poisons et la capacité à transformer ses ennemis en créatures monstrueuses. Peu à peu, même les dieux la redoutent. Son père lui ordonne de s’exiler sur une île déserte sur laquelle elle développe des rites occultes et croisent tous les personnages importants de la mythologie : le minotaure, Icare, Medée et Ulysse… Mais cette existence de femme indépendante et dangereuse inquiète les dieux et effraie les hommes. Pour sauver ce qu’elle a de plus cher à ses yeux, Circé doit choisir entre ces deux mondes : les dieux dont elle descend, les mortels qu’elle a appris à aimer.
Mon avis : 4/5
Je ne savais pas trop à quoi m’attendre lorsque j’ai commencé Circé. J’en avais eu de très bons échos, mais je ne m’étais pas penchée plus que cela sur le roman. Et puis, une amie me l’a offert et je me suis dit que c’était le moment de se lancer. Je n’avais même pas lu le résumé, et je ne connaissais pas plus que cela le personnage de la légendaire sorcière titan, mais étant fan de la mythologie grecque, je partais plutôt confiante.
Ce fut une très bonne lecture. J’aurais voulu que ce soit un coup de coeur, mais certains éléments ont fait que ma lecture ne m’a pas emportée aussi loin que je le souhaitais. Néanmoins, il reste l’un des meilleurs récits que j’ai pu lire cette année, et je suis assez curieuse de découvrir son autre oeuvre sur Achille. Que l’auteur soit une enseignante de grec ancien et de latin ainsi qu’une inconditionnel de Shakespeare ne fait aucune doute. On sent la maîtrise au niveau de la mythologie et l’influence du dramaturge britannique (peut-être un peu trop, mais j’y reviendrais plus tard). Et pour autant, je pense que quelqu’un qui ne s’y connait pas forcément en mythes et légendes grecs peut tout à fait se lancer dans l’aventure. Donc, ne soyez pas effrayés vis-à-vis de cela.
J’ai réellement apprécié la première partie. On y voit clairement l’évolution de Circé. De la jeune femme perdue et effacée, à la limite de la pauvre malheureuse sans aura, à la sorcière d’abord débutante et non préparée à la vie, à celle qui ensuite s’épanouit dans son art et devient cette femme de légende. La condition féminine y est dépeinte de façon « crue » et tout à fait réaliste, même si nous nous situons dans un contexte divin. On y voit autant la soumission de la femme en Circé, que Perséis, sa mère, qui ne trouve gloire qu’en engendrant des enfants et en restant belle, ou bien Pasiphaé qui voit clair dans le jeu des hommes et décide de jouer de ses charmes pour pouvoir faire sa place, quitte à y perdre son âme. Des modèles sculptés par les hommes, il y a fort longtemps et qui sont ancrés malgré eux, n’étant plus qu’une banalité face à cette violence sans nom. C’est une critique pour moi, une dénonciation, mais aussi une prise de conscience et une lutte par la suite. La mise en avant de la sorcellerie est un pied de nez, d’ailleurs, à cette condition si peu reluisante. J’ai aimé voir cet art lié à la terre et la nature et fondé sur les désirs profonds de celui qui peut le pratiquer. Il était assez rafraîchissant de ne pas traiter du sujet de façon obscure et malsaine.
La seconde partie du roman est celle qui m’a le moins plu. Elle était intéressante, car elle traite d’une période de la vie d’une femme en toute franchise et sans l’édulcorer. Il y a un côté plus vif dans l’émotion, plus à fleur de peau, et c’est un point pivot qui va décider de l’avenir de nombreux personnages. Mais j’ai aussi trouvé que c’était un retour en arrière pour Circé. La venue de Télégonos dans sa vie fait que notre héroïne n’est plus femme, plus sorcière, plus maîtresse de son destin. Il y a beaucoup d’oppression, et le fait que le jeune homme soit insupportable la plupart du temps fait que j’ai eu du mal à traverser cette période avec Circé.
Autre point que j’ai moyennement apprécié : Ulysse. La manière dont il est dépeint est assez sinistre et ce n’est pas l’image que je me fais de lui. Après, il y a ce traitement du syndrome post-traumatique lié à la guerre qui est pertinent et subtilement amené. Mais dans l’ensemble Ulysse est plus un monstre que le héros valeureux que l’on peut connaître. Et c’est un aspect assez global dans le roman. L’auteur donne l’impression que personne n’a grâce à ses yeux. Les caractères des uns et des autres sont dépeints de façon judicieux vis-à-vis des Dieux et des mortels, mais il n’y a pas une once de bonté et dès qu’une lueur apparaît, elle est réduite à néant. Cette négativité finit par peser.
La fin offre cependant cette aurore cajolante qui permet de respirer et de finir la lecture du roman de façon plus sereine. Le destin de Circé est traité jusqu’au bout, en lui rendant justice de manière tout à fait convaincante. La sorcière a été une héroïne captivante, nageant parmi de nombreux personnages célèbres, et nous contant sa vie sans aucun artifice et avec franchise. Télémaque, contre toute attente, fut le seul personnage masculin avec Dédale à sortir du lot et que j’ai réellement apprécié. Un roman féministe dans le bon sens du terme qui mêle avec perfection légendes et romanesque.
Je suis justement en train de le lire et pour l’instant j’aime beaucoup mais je n’ai pas encore dépassé la moitié du livre!
J’espère que tu aimeras la suite de ta lecture en tout cas :)